Val-d’Or, qui célèbre cette année son 75e anniversaire, n’échappe pas à une sorte de règle générale qui veut que l’histoire soit parsemée de pièges et de zones troubles. L’histoire de cette ville est effectivement marquée par des controverses qui semblent ne jamais vouloir se résorber. Plongé dans des tiraillements, tenu à des arbitrages, l’historien doit tout de même trancher s’il veut mener à bien son travail, se créant ainsi, inévitablement, des adversaires dans un camp ou dans l’autre. Répondre aux questions Quoi? Quand? et Qui? peut parfois s’avérer périlleux…

Quoi? Le nom de Val-d’Or a fait l’objet de longs débats, souvent acerbes, si bien que ce n’est que le 6 novembre 1950, suite à trois séances au cours desquelles on a longuement délibéré, que les membres du comité de linguistique de l’Académie canadienne-française s’entendent sur l’orthographe de Val-d’Or, avec trait d’union, apostrophe et « O » majuscule. La Commission de toponymie du Québec a par la suite sanctionné ce choix. Des irréductibles, comme Colette Germain, dont le père a imposé l’apostrophe du toponyme Val-d’Or, s’apposeront toujours au trait d’union.

Quand? Val-d’Or est officiellement constituée en municipalité de village le 15 août 1935. Deux ans plus tard, soit le 20 mai 1937, Val-d’Or est érigée en municipalité de ville. Quelle date retenir quand il est question de déterminer l’acte de naissance de la municipalité? Les cartes ont été un peu brouillées par le fait que Val-d’Or a célébré son 10e anniversaire en août 1947, tout simplement parce qu’en 1945, en pleine guerre mondiale, les rationnements restreignaient trop fortement les ressources et ne prêtaient pas à des célébrations fastes. Reste que le maire de Val-d’Or de 1976 à 1980, puis de 1992 à l’an 2000, Ronald Tétrault, soutient encore avec acharnement que Val-d’Or a vu le jour en 1937, même si c’est effectivement en 1935 que Val-d’Or devient Val-d’Or de fait et de droit.

Qui, d’Émile Saint-Jarre, de Mike Mitto ou de Gabriel Commandant peut être tenu pour fondateur de la ville? En fait, chacun a joué un rôle déterminant, mais nul n’a vraiment posé un geste fondateur sans équivoque. Val-d’Or est bel et bien une création collective. Et le litige, avec Commandant, se double d’une controverse concernant la façon correcte d’écrire son nom. Notons, au passage, que dans l’édition d’avril-mai 2010 de la revue Québec Science, le chroniqueur Serge Bouchard signe un éloge de Gabriel Commandant d’un lyrisme insurpassé. L’article est titré : Abitibi ou l’histoire du silence.