Je vois des gens passer le motoculteur dans leur jardin et je me demande s’ils savent comment bien utiliser cet outil. En fait, on sait qu’il est préférable d’ameublir la terre pour jardiner. Mais ameublir la terre du jardin ne veut pas dire en faire de la farine.

Le sol est naturellement structuré. Il a besoin de cette structure car les éléments qui le composent permettent aux systèmes racinaires de s’ancrer solidement. Si on utilise le motoculteur comme un moulin à farine, on déstructure le sol et même, on favorise sa compaction, ce qui n’est pas souhaitable. Une motte dans la main doit pouvoir se défaire assez facilement, mais elle doit également offrir une certaine résistance et on doit pouvoir reconnaitre les vestiges des applications de compost des saisons passées. C’est dans un tel sol que les plantes peuvent le mieux évoluer et produire.

Il faut donc passer le motoculteur en gardant à l’esprit que sa fonction principale se résume à aérer le sol et à briser les racines des plantes adventices, appelées aussi mauvaises herbes, qui ont pu s’installer à la saison dernière pour mieux les éliminer. Ainsi, on préparera une planche de 15 mètres en 20 minutes, peut-être, selon la nature du sol. Plus de temps sera nécessaire si le sol est lourd. (Aussi appelée plate-bande, une planche correspond en général à la largeur de terre enjambée par le tracteur. Dans certains cas, les planches sont surélevées et sont alors appelées des buttes.)

Les années nous apprennent à considérer les aspects pratiques inhérents au jardin. Des planches droites, montées à la bêche, seront faciles à semer et à récolter. La brouette pourra y circuler sans peine. Le paillis dans les allées étroites sera utile pour contrôler les mauvaises herbes. La fantaisie aura sa place en semences de fleurs annuelles entre les variétés de légumes sur une même planche et le compagnonnage donnera de meilleurs résultats car les plantes sont des aides mutuelles.

C’est un fait : mieux vaut attendre que tout danger de gelée soit passé pour semer. Ainsi, certaines semences comme les fèves et les pois sont si fragiles que seul un sol chaud les fera germer dans les meilleures conditions. Ces légumineuses germeront en se gorgeant d’eau et deviendront d’autant plus sensibles aux changements de température. Si on les met en terre trop tôt lorsque le gel menace encore, elles risquent plutôt de pourrir en terre, faisant perdre ainsi un temps précieux puisqu’en plus d’essuyer une perte sèche en semences perdues, il faudra tout recommencer. Si la déconfiture survient, ce sont autant de leçons désormais intégrées pour qui veut bien apprendre de ses erreurs.

Tôt au printemps, la nature favorise les plantes adventices, parce qu’elles sont souvent indigènes et adaptées au climat. D’une part, elles résistent aux gelées tardives alors que les légumes trop tôt semés auront besoin de protection, sinon, le gel aura tôt fait de les détruire : seule une présence régulière au jardin et des interventions radicales de sarclage assureront des résultats.

Juillet est le mois de l’expansion chez les plantes alors qu’août est celui du mûrissement. Mais pour les mauvaises herbes parfaitement adaptées, il en va autrement. Elles mûrissent vite et si bien que si l’intervention n’a pas eu lieu partout au jardin avant la mi-juillet pour les éradiquer, il en résultera un envahissement certain. Le travail pendant le premier mois suivant la semence est déterminant. Dès que les semences sont terminées, il faut s’appliquer au sarclage et au bêchage, sinon, la prolifération galopante des indésirables sera étonnante. Il ne faut pas négliger son jardin à cette période critique. C’est du bon temps qui sera investi au bon endroit.

Ultimement, on profitera d’un tableau à nul autre pareil, tous les jours changeant, grâce à la lumière et parce que les lunes jouent sur les plantes. Le reste, c’est de l’entretien et de la cueillette. Toujours entrer au jardin muni d’une bêche : cet outil est le prolongement de la main en beaucoup plus efficace. Le maraîcher en ressortira grandi, rassasié de grand air, de chants d’oiseaux, de soleil et d’une nourriture saine.

Le soir venu, le sommeil viendra cueillir le jardinier comme la plus belle fleur de son jardin.


Auteur/trice

Chroniqueuse autodidacte pour L'Indice bohémien et pour le Journal Le Pont de Palmarolle. Les sujets couverts touchent, entre autres, l'actualité, la lecture, le jardinage, le végétarisme, l'interprétation de l'objet patrimonial, les arts visuels, le portrait, l'amour de la nature et de la culture. Prix de l'AMECQ 2019 pour la meilleure chronique Notre région a cent ans.