C’est devenu périlleux de regarder le fil de presse, en ces jours où la luminosité diminue. De prime abord, la fin de l’été n’est jamais joyeuse. Les vacances sont finies, la rentrée coûte cher. Aux nouvelles, on ne trouve rien pour remonter le moral. Rien. Vraiment.

Les forages commencés à Cacouna, alors même que l’été s’est avéré funeste pour un nombre record de bébés bélugas du fleuve Saint-Laurent. Le refus d’ouvrir une enquête nationale sur la disparition et les assassinats des femmes autochtones. L’annonce de la fin des programmes d’aide aux garderies en milieu défavorisé, dont les petits déjeuners aux enfants dans le besoin. Les coupes de 173 millions dans nos universités, dont 2 millions dans le budget de l’UQAT. Et le ministre Bolduc et ses mémorables déclarations sur les livres et la lecture dans les écoles. La fermeture des directions régionales du ministère de l’Éducation. La perte de la direction régionale du ministère de la Culture et des Communications, dont celle de l’Abitibi-Témiscamingue, désormais fusionnée avec l’Outaouais et le Nord-du-Québec. La fermeture envisagée des Conservatoires de musique de toutes les régions du Québec, y compris celui de Val-d’Or. On dirait un démantèlement progressif des régions. Ah non! Je me trompe. Dans les régions, une chance, il y a des ressources naturelles…

Il me semble que le tableau qui se brosse devant moi est celui d’un état qui gruge sciemment ce qui constitue son âme et sa culture et qui réduit la vision de ce que devrait être l’éducation à celle d’un vulgaire placement bancaire. On met de l’argent là où l’industrie est payante; on semble vouloir former des jeunes, non pas pour leur mieux-être et en faire des citoyens informés, pensants et engagés, mais pour en faire de bons petits soldats qui répondent aux besoins de l’employeur. Et que le meilleur gagne.

Oui, c’est périlleux pour le moral d’essayer de rester au courant. Un immense et tenace sentiment d’impuissance m’envahit. Mais parce que l’ignorance pave la voie à tous les abus, je crois qu’il faut continuer avec acharnement de chercher à savoir ce qui se cache derrière les discours fabriqués, calculés. Il faut s’indigner, même si la tâche est usante. La meilleure arme de combat demeure l’information. Mais pour le commun des mortels, là aussi, c’est la déprime. On en est rendus à se méfier des bulletins de nouvelles-spectacles et de leurs analyses nivelées par le bas, en plus d’être aux prises avec un manque flagrant de transparence et d’accès à l’information dans tous les paliers du gouvernement fédéral.

Bien sûr, on constate avec désarroi que ceux qui détiennent les journaux et les chaînes de télévision ont tout à gagner à maintenir le « petit peuple » dans le divertissement plutôt que dans l’analyse. Ils commencent dangereusement à gagner leur pari.

Je n’en peux plus des rackets et des menteurs. Des commissions Charbonneau qui ne condamnent personne et qui nous montrent à quel point on se fait … avoir… vider les deniers publics au profit de bandits qui mettent ensuite leur argent à l’abri de l’impôt. Ce texte est un énorme cri de ras-le-bol contre tous ceux qui se pensent légitimes et qui établissent des lois en fonction de ce qui les enrichit individuellement.

Je n’en peux plus des nombrils qui font fi des enfants en difficulté, des misères de certaines réserves autochtones de notre tiers-monde canadien. De ceux qui regardent le milieu culturel et les intellectuels de haut. Je n’en peux plus de la condescendance des magnats en tout genre, du vol de propriété intellectuelle des créateurs par les fournisseurs de service internet, des stratèges de l’image, des manipulateurs. Je n’en peux plus de cette ère de l’obscurantisme et du règne de la peur qu’on nous érige en système. Je dis non.

Même le Fonds monétaire international (FMI), qui n’est pas a priori reconnu pour ses positions très socialistes, avoue que les mesures d’austérité n’ont rien de payant pour un pays. Tsé, si le FMI le dit… Je dis non aux coupures dans tous les services communautaires, souvent offerts aux populations vulnérables. Je dis non au démantèlement des régions, à l’expropriation de nos pouvoirs décisionnels. Je sais qu’il vaut mieux pour notre petit confort être dans le déni plutôt que dans la colère, mais collectivement, la colère est un moteur puissant. Elle mène parfois dans la rue. Qui sait, parti comme c’est là, peut-être qu’en décembre prochain, plutôt que des Pères Noël dodus, la couleur rouge reviendra dans la rue, sur des petits carrés…


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