Il faut sans contredit une bonne dose d’audace pour transposer une recette gagnante de festival de fin d’été en plein cœur de l’hiver abitibien. C’est pourtant ce que l’équipe du FME a tenté de faire du 29 au 31 janvier dernier à Rouyn-Noranda. Bien qu’à l’extérieur la température n’ait pas été des plus clémentes, le rendez-vous entre les artistes et le public a encore une fois créé des étincelles, mettant le feu au passage. Retour sur ce vendredi de la première édition de Quartiers d’hiver.

C’était un FME, mais une version raccourcie d’un jour. Pas de long congé pour les festivaliers, pas non plus de vacances estivales derrière la cravate pour se préparer à l’expérience. Car bien qu’on puisse attraper au vol un ou deux spectacles à la carte, faire un FME, ça veut dire se gaver de musique, se coucher tard et danser beaucoup. Ça prend donc une certaine réserve d’énergie, laquelle, à l’inverse du décor environnant, fond au fur et à mesure que les jours passent.

Les organisateurs avaient d’ailleurs espéré que le mercure se la joue relax, des bars extérieurs ayant été installés aux quatre coins de l’évènement pour ajouter à l’expérience festive un petit air de pêche blanche. Hélas, l’expression « chiller » prend tout sons sens en même temps qu’il le perd lorsque le thermomètre affiche – 29 C. Qu’à cela ne tienne. La programmation avait des airs de fête qui ont tôt fait de nous faire oublier qu’on vit au nord du 48e parallèle.

L’habit fait le moine

Le premier triplé à la scène Paramount avait des airs de soirée électro, bien que l’horaire soit mieux adapté aux nombreux fans de nuits blanches de jadis qui sont entretemps devenus parents. Technical Kidman ouvrait le bal, mettant la table à une prestation où se sont enchaînées les bizarreries. Si la portion rythmique du band semble tout à fait prometteuse, la superposition de la voix à ce laboratoire musical n’est pas ce qui confère à l’ensemble une plus-value artistique. N’empêche, le chanteur, vêtu pour un après-ski d’occasion, a fait son possible pour dégeler un public dubitatif et rien que pour l’effort, il mérite une petite étoile.

Le duo Beat Market a ensuite pris la scène d’assaut, vêtu de costumes évoquant un improbable Goldorak disco à tête de canard et de mouton frisé. Effet garanti. En plus de mettre un air de folie sur la scène, le groupe a offert une solide prestation électro à saveur house et dance, à laquelle les danseurs ont répondu présents. Les influences musicales qui composent leur matériel semblent provenir des trois dernières décennies, tout le monde en a donc eu pour son argent.

La formation Artist of the year, presque devenue une habituée du FME, a bouclé la soirée en beauté, ajoutant au programme musical une touche funk et disco sans pareille. Le costume étant à l’ordre du jour, cette fois-ci on était allé du côté de la NASA ou du Village des Valeurs pour dénicher quelques magnifiques spécimens d’astronautes. Artist of the year est une formation qu’il faut vraiment voir en spectacle, tant pour leur fougue que leur délicieuse arrogance. Leurs albums sont plutôt éloignés de l’expérience scénique qu’ils proposent, offrant un son plus cérébral, plus épuré, pouvant sans doute satisfaire les adeptes sérieux de musique électro mais celui qui a connu l’ivresse d’une soirée au FME sera sans doute déçu de ne pas y retrouver la même énergie contagieuse.

Mariage de l’Afrique et d’Ani Kuni

C’est au Diable Rond que la soirée de vendredi s’est terminée, toute en chaleur et en sourires. En effet, Pierre Kwenders a su charmer un moins d’une seconde son public, tant par son charisme irrésistible que par ses déhanchements causant des émotions dans la gente féminine. Mélange savoureux de rythmes africains modernes et traditionnels (avec Julien Sagot aux percussions) avec des airs hip hop et électro, Kwenders ne s’enfarge dans rien car la musique n’a pas de frontières, encore moins pour lui! Sa version unique du refrain très québécois et pas du tout autochtone Ani Kuni est un bon exemple de ce qu’il y a de jouissif dans sa musique, sans compter quelques touches Radio radioesques à travers. Du pur plaisir. Il a été consacré Révélation musicale 2014 en musique du monde par Radio-Canada, on a compris pourquoi. Un petit détour du côté de Bonsound et vous y découvrirez son album Le dernier empereur bantou paru à l’automne dernier.

Bon, l’Indice bohémien y était samedi aussi, lisez la suite de nos aventures demain!


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