Dans notre région, le rougissement des feuilles vient avec l’envie de partir dans le bois. Aller chasser, vivre cette expérience à l’existence plurimillénaire semble pour certains être un des meilleurs moyens de se réconcilier avec sa propre nature.

Avec Un film de chasse de filles (2014), la réalisatrice Julie Lambert nous emmène suivre les pistes de ces femmes qui ont eu la piqûre pour la chasse. Gagnant du Prix du public et du prix du Meilleur premier film au Festival de cinéma de la ville de Québec, ce documentaire défait le mythe selon lequel le port de la carabine serait réservé aux hommes. Que ce soit en Abitibi-Témiscamingue, en Outaouais ou en Mauricie, on compte finalement bien plus d’adeptes de la chasse chez les femmes qu’on ne pourrait le croire.

Dès l’ouverture du documentaire, on sait ce qui attend la réalisatrice, c’est-à-dire un processus d’apprentissage auprès de quatre femmes et filles qui lui serviront de modèles, de guides d’initiation à la chasse : Florence, Megan, Hélène et Janie lui enseigneront, malgré elles, en quoi consiste le fait d’abattre un animal. De la façon de tenir sa carabine à la façon de rester attentive et immobile pendant des jours durant, elles lui donneront l’exemple à suivre pour qu’à la fin du documentaire, Julie Lambert sache quoi faire à la vue de son premier chevreuil.

Dans Un film de chasse de filles, tout est dans la relation avec la nature. Les mouvements du ciel et des arbres prennent une place importante dans la photographie du film, ponctuant le récit et harmonisant l’attention du spectateur avec la patience des chasseuses, avec l’aspect méditatif de ce sport.

                                                                                                          

On découvre aussi avec la réalisatrice une autre façon de vivre le plus vieil art au monde : loin des boys club, loin des concours du plus gros buck, sans compter les pointes aux panaches, mais en vivant plus humblement ce moment de confrontation avec la nature. « Un gars, quand il tue, c’est toujours un mâle, un gros, c’est toujours plus qu’une madame, fait remarquer Florence. Même si la femelle que t’as tuée est meilleure au goût, lui, il est toujours le meilleur. Wô les moteurs! »

La fierté qu’elles retirent de cette réappropriation paraît vitale. Cela commence avec la relation avec son fusil, l’achat de ses munitions, le soin donné à choisir ses appâts, le choix de l’emplacement, et ce, jusqu’au dépècement de la bête. Ces femmes prennent un goût nécessaire à se sentir capable.

On est très loin ici d’une leçon de morale : Julie Lambert laisse le soin aux femmes d’élaborer le propos du film, soit le fait que pour nombre de femmes, vivre cette passion pour la chasse constitue, de façon consciente ou non, une façon de se valoriser sans se comparer aux hommes. C’est un moyen d’affirmer son existence en prenant en charge un volet important de sa propre subsistance. Le réel besoin d’aller chasser n’est pas alimentaire, il est plutôt existentiel.

Un film de chasse de filles est disponible en DVD et en location en ligne sur parallaxes.ca \


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