L’automne dernier, pour expliquer sa décision de former un conseil des ministres avec un nombre égal de femmes et des d’hommes, M. Trudeau lança : « Parce qu’on est en 2015 ! » C’est un peu court, mais pas surprenant, venant d’un premier ministre qui préfère l’égoportraitcomme stratégie de communication, voire de politique étrangère. C’est un slogan, parfait pour être partagé sur Twitter. J’aurais préféré que M. Trudeau nous dise qu’il a choisi les 30 meilleures personnes pour diriger le pays.

Mais voilà, j’écris et j’hésite. Moi, je remets en question cette idée de parité, la pièce maitresse féministe depuis quelques années. Me voilà en terrain miné et j‘hésite. Par crainte? Celle de me faire traiter de macho ou de pur produit de la société patriarcale? Jeannette Bertrand et Geneviève St-Germain m’attendront-elles au tournant?

Depuis 50 ans, les femmes ont fait de gigantesques avancées, indéniables mais nécessaires et surtout profitables pour tous. Notre société a changé, et les hommes aussi, en général, contrairement à ce que peut penser Lise Payette… La parité en politique est-elle devenue le nouvel horizon? Oui, il faut plus de femmes en politique. À tous les niveaux. Ce sera un gain : l’approche, les idées et les méthodes sont différentes. Quoique. Les Britanniques pourraient vous parler de Margaret Thatcher…

Je questionne, je fouille et je lis. Les raisons en faveur de la parité en politique sont solides : elle établit l’égalité dans les faits, elle aide à contourner les résistances et force les partis à trouver des candidates de qualité, à qui, oui, il faudra offrir de bons comtés! Pas une femme péquiste dans Westmount pour se donner bonne conscience! Les arguments en défaveur, eux aussi, ont leur poids. La philosophe Elizabeth Badinter expliquait que la parité, au fond, est humiliante et victimisante et qu’elle crée finalement une inégalité inverse envers les hommes. C’est déshabiller Pierre pour habiller Pauline!

Est-il possible d’être pour le principe et contre les moyens? Pour le principe, pour mettre fin à l’explication machiste de l’incompétence d’une personne parce que c’est une femme ; contre le moyen, pour éviter la nomination d’une personne incompétente parce que c’est une femme. Il y a encore des plafonds de verre à casser. La représentation à Québec, par exemple, stagne depuis quelques années. Mais cinq femmes dirigeaient une province canadienne il y a deux ans. La parité! Mais 50/50, dans une loi, est-ce la solution? Ou serait-ce plutôt de proposer des conditions plus facilitantes pour les femmes : horaire, congés, etc.?

Parce que la parité, si on en fait un principe, il la faudra à double sens. L’État devra engager plus d’enseignants masculins au primaire et plus d’infirmiers dans les hôpitaux. Il devra organiser et financer un concours pour inciter les garçons à se tourner vers des métiers traditionnellement féminins. Il imposera des quotas d’admission en médecine. Car au final, c’est d’égalité dont il est question. \


Auteur/trice

Abitibien d’adoption, Valdorien depuis 20 ans, Dominic Ruel est enseignant en histoire et géographie au secondaire. Il contribue à L’Indice bohémien par ses chroniques depuis les tout débuts, en 2009. Il a été président du CA de 2015 à 2017. Il a milité en politique, fait un peu de radio, s’est impliqué sur le Conseil de son quartier et a siégé sur le CA du FRIMAT. Il aime la lecture et rêve d’écrire un roman ou un essai un jour. Il est surtout père de trois enfants.