Vous êtes-vous déjà demandé pourquoi le gouvernement n’avait plus les moyens de financer les services publics? Comment se peut-il que tous les pays soient endettés? Que veut dire, pour un État, « vivre au-dessus de ses moyens »? En période de grande instabilité économique, ce sont des questions qu’on peut se poser de façon légitime. Le débat autour du financement des services publics polarise mais, malheureusement, on ne parle que des symptômes plutôt que de la cause du problème. La première question à se poser est : « Il est où l’argent et il est à qui? »

Savez-vous qu’aujourd’hui, au Canada, 97 % de tout l’argent en circulation n’est pas créé par le gouvernement, ni même par la banque centrale? Actuellement, les États fabriquent et mettent en circulation l’argent « liquide » constitué des billets de banque et des pièces de monnaie. Ce type d’argent ne représente qu’une infime proportion de tout l’argent en circulation, la masse monétaire.

Concrètement, comment ça se passe? Lorsqu’une banque vous octroie un prêt hypothécaire de 200 000 $, elle ne vous transfère pas l’argent d’un autre épargnant obtenu en dépôt. Elle vous fait signer un contrat dans lequel vous vous engagez à rembourser votre prêt avec intérêts, en échange duquel elle crédite votre compte de 200 000 $, simplement en pianotant une ligne dans son système informatique. Cette somme est ensuite transférée vers le compte de celui qui vous vend sa maison et circulera par la suite dans l’économie.

Cet argent n’existait pas avant que la banque ne le crée pour vous, comme par magie, et disparaîtra dès lors qu’il sera remboursé. Cet argent neuf n’est donc pas créé par la Banque du Canada, mais par une banque privée, qui « prête » quelque chose qu’elle ne possède pas, en échange d’intérêts onéreux. « Le processus par lequel les banques créent l’argent est si simple qu’il repousse l’esprit », disait l’économiste américain John Kenneth Galbraith. Le problème est que l’État se finance lui aussi auprès de ces institutions privées plutôt que de créer sa propre monnaie, se soumettant au service d’une dette inutile, ruineuse et, qui plus est, impossible à rembourser malgré toutes les politiques d’austérité imaginables. Ça semble invraisemblable, non? Pourtant, au Canada, 97 % de l’argent en circulation est constitué de dettes, publiques et privées, portant intérêt, contractées, à un moment ou à un autre, envers les banques.

Cette chronique a pour objectif d’apporter un éclairage nouveau concernant les questions économiques et politiques. Les dettes publiques ne sont pas une fatalité, mais le résultat de la négligence des gouvernements à exercer l’un de leurs devoirs primordiaux, celui d’émettre sans dette l’argent (moyen d’échange) dont nous avons tous besoin afin de faire fonctionner l’économie et la société convenablement. Un gouvernement qui est maître de sa monnaie ne peut pas vivre au-dessus de ses moyens. Cette discussion, bien que presque inexistante au sein de nos institutions politiques et médiatiques, connait certains développements prometteurs au Canada et ailleurs, en Europe notamment, qui méritent notre attention. La restitution à l’État du pouvoir de création monétaire permettrait la libération de la société du joug des créanciers et la réalisation du plein potentiel social. \