Dans la famille Bégin, le premier descendant à s’être implanté en Abitibi-Ouest est venu s’y établir en 1933. Il arrivait de Sainte-Germaine-de-Dorchester (aujourd’hui Lac-Etchemin, en Beauce) et a choisi de prendre racine à Sainte-Germaine-Boulé, où il a développé une ferme laitière.

Patrice Bégin, qui habite le village de Sainte-Germaine-Boulé, complète en ce moment un processus de transfert de la ferme familiale. Ce sera une quatrième génération qui prend le relai, et déjà, la cinquième se prépare.

« Mon fils a deux ans et demi. On lui a acheté des petits tracteurs jouets… et il dort avec la nuit », dit-il en riant.

Il n’est pas le seul à avoir l’agriculture dans le sang. Bertrand Bégin, son oncle, y a aussi fait carrière; Alexandre et Maxime Bégin ont une ferme de bœufs et de maïs sucré. Sa sœur, qui a étudié en nutrition, a aussi un conjoint qui est dans l’agriculture. C’est sans compter d’autres lignées du patriarche, des Jalbert et des Chabot, qui ont aussi fait de la vie fermière leur mode de vie.

« Au fil des générations, la passion a su se transmettre. Pour moi, c’est l’attachement à la terre et aux animaux, mais aussi le mode de vie. Toujours chez nous : je me sens vraiment à ma place », raconte Patrice Bégin.

Les couts sont bien sûr un enjeu, mais avec un bassin familial bien établi, les Bégin ont trouvé une manière de moderniser leurs équipements sans avaler seuls la facture.

«  Avec l’utilisation de la machinerie en coopérative, avec le principe d’utilisateur-payeur, on réduit nos couts de production tout en nous permettant d’acheter une technologie moderne, sans hypothéquer la rentabilité de la ferme », explique Patrice Bégin.

Un court exil pour mieux revenir

Patrice Bégin aurait pu compléter une formation professionnelle à Ville-Marie, mais il a opté pour une formation collégiale à Saint-Hyacinthe, en Montérégie. Il y a étudié, bien sûr, mais a aussi pu noter des différences régionales importantes qui vont au-delà du climat et de la taille des fermes.

« Ce qui m’a frappé, c’est la situation financière des entreprises. Certaines comptaient 7 générations. Nous sommes une jeune région, mais qui a fait beaucoup de progrès rapidement. On n’a peut-être pas les mêmes affaires, mais il faut être fiers de ce qu’on a pu faire aussi rapidement. Voir de grandes cultures, ça aide à comprendre les décisions politiques, mais j’étais bien content de revenir dans la région. On est bien ici, chez nous. »

À 27 ans, Patrice Bégin est encore bien jeune pour prendre la relève de l’entreprise familiale, mais ses parents sont prêts à lui laisser les rênes. Son père n’a que 55 ans, sa mère en a 53, et s’ils ont dit qu’ils s’impliqueront toujours un peu, il sent qu’il devra aussi faire face à ses responsabilités.

« Ils vont venir m’aider, mais je crois qu’ils ne s’empêcheront plus », devine-t-il.

Préparer le transfert n’est pas non plus une décision qui s’improvise. Les premières discussions ont eu lieu en 2007.

« Il fallait préparer l’entreprise, se trouver un bon fiscaliste, un bon comptable, y aller par étape », dit-il.

Tout ce processus a aussi permis de jauger du sérieux de sa démarche.

« À un jeune qui aurait la passion, je dirais vas-y, ça vaut la peine. Mais il ne faut pas se garrocher tout seul. Des difficultés, il y en a toujours, il faut seulement savoir bien s’entourer », conclut-il avec philosophie et une étonnante maturité.


Auteur/trice

Lise Millette est journaliste depuis 1998, tant à l'écrit qu'à la radio. Elle a également été présidente de la Fédération professionnelle des journalistes du Québec (FPJQ). En Abitibi-Témiscamingue, elle a été rédactrice en chef de L'Indice bohémien en 2017 et depuis, elle continue de collaborer avec le journal.