Cet été, j’ai regardé Y’a du monde à messe, à Télé-Québec. Un bon talkshow tourné dans une église, avec Christian Bégin entouré d’une chorale gospel. Des personnalités y passaient, mais on était loin des entrevues futiles et utiles pour faire mousser une carrière ou vendre des billets. Au contraire. Un thème unissait les invités et chaque conversation se faisait sur le ton de la confidence, sur des sujets parfois drôles, touchants, complexes. On avait réinventé le « show de chaises » de belle façon.

Cette émission illustre parfaitement ce qu’est la télé publique québécoise : un tour de force! Avec un budget limité, des ressources insuffisantes, Télé-Québec est capable d’offrir une programmation de grande qualité, audacieuse et qui respecte surtout l’intelligence du téléspectateur. Ce qui est de plus en plus rare.

Télé-Québec respecte un mandat clair, celui « de développer le gout du savoir, l’acquisition de connaissances, de promouvoir les arts et la culture et de refléter les régions et la diversité québécoise ». Ça pourrait être aride. Mais elle prouve qu’on peut le faire en montrant autre chose que des documentaires sur les tigres, des téléthéâtres ou des cours universitaires. Elle arrive à remodeler les concepts, des émissions de cuisine aux séries pour enfants et ados en passant par les magazines d’information et les entrevues. C’est À la di Stasio et Curieux Bégin, c’est Subito texto et Cochon dingue, c’est Deux hommes en or et Belle et Bum. On innove, on challenge le public.

Télé-Québec pourrait servir de modèle à suivre à Radio-Canada. En évacuant ses contenus d’information, de culture et de science vers RDI, ARTV et Explora, auxquelles il faut s’abonner (point important ici!), la chaine généraliste s’est lentement métamorphosée en TVA. En cherchant à concurrencer les autres canaux privés, elle a abandonné une envergure qui était sa marque de commerce durant des années. Même le hockey était présenté avec une certaine noblesse. Il reste bien quelques émissions de qualité. Mais le divertissement a pris le dessus. Cet été, Le beau dimanche et Les éclaireurs ont été grotesques. On recherche à augmenter la cote d’écoute ou à faire du nation building. Guy Fournier, homme de télé et ancien président du Conseil de Radio-Canada, s’indigne :

Les téléspectateurs qui souhaitent regarder des programmes de plus haut niveau, qui ne prennent pas la télé comme un bruit de fond destiné à meubler leur ennui, n’ont qu’à regarder ailleurs. À regarder ailleurs, mais à payer davantage aussi. Les impôts que nous versons pour la télé publique et les publicités dont elle nous submerge ne suffisent donc pas?

Une télé publique doit respecter l’argent des contribuables qui y est investi. Elle a une obligation de qualité et non de bons sondages. Une télé publique a une mission de transmission. Elle doit être un espace pour apprendre et découvrir. Elle doit être capable d’enrichir la vie des gens. Le divertissement sera ailleurs de toute façon.


Auteur/trice

Abitibien d’adoption, Valdorien depuis 20 ans, Dominic Ruel est enseignant en histoire et géographie au secondaire. Il contribue à L’Indice bohémien par ses chroniques depuis les tout débuts, en 2009. Il a été président du CA de 2015 à 2017. Il a milité en politique, fait un peu de radio, s’est impliqué sur le Conseil de son quartier et a siégé sur le CA du FRIMAT. Il aime la lecture et rêve d’écrire un roman ou un essai un jour. Il est surtout père de trois enfants.