Virginia Pesemapeo Bordeleau est une artiste-peintre et une auteure crie bien connue dans la région qui « jouit d’une réputation enviable sur le plan international en arts plastiques et qui est en voie de devenir une référence incontournable en littérature autochtone », selon les Éditions du Quartz qui ont publié deux de ses recueils de poésie. 

 

En effet, l’année 2018 a été riche en activités pour Virginia Pesemapeo Bordeleau avec la parution de deux ouvrages (le livre de contes Celle-Qui-Va aux Éditions Hannenorak et Poésie en marche pour Sindy aux Éditions du Quartz), la présentation de deux expositions (Ourse cosmique à l’Écart et Aki Odehi, cicatrices de la Terre-Mère au Centre d’exposition de Val-d’Or), des conférences à Kingston et à Toronto, la participation à plusieurs salons du livre et le projet Les brodeuses (réparation symbolique des blessures subies par les femmes autochtones de Val-d’Or). Elle a également présenté un poème à la clôture de la Commission d’enquête sur les relations entre les Autochtones et certains services publics au Québec (Commission Viens).

 

UNE VOIX POUR LES FEMMES AUTOCHTONES DISPARUES ET ASSASSINÉES

Comme en témoignent plusieurs de ses œuvres littéraires et artistiques, Virginia Pesemapeo Bordeleau est profondément impliquée dans la cause des femmes autochtones disparues et assassinées. Sindy Ruperhouse, à qui elle a dédié plusieurs de ses projets, est une femme de Pikogan disparue il y a presque cinq ans. « Sa tante Alice Jérôme est une amie, mes parents avaient des relations très proches avec les Abitibiwinnis. Je ne voulais pas que la disparition de Sindy soit tablettée, passée sous silence comme c’est souvent le cas quand il s’agit de femmes autochtones », explique l’artiste qui a remis toute sa part de redevances sur le recueil Poésie en marche pour Sindy aux parents de la jeune femme afin qu’ils puissent poursuivre leurs recherches.

 

L’avenir s’annonce tout aussi rempli pour Virginia Pesemapeo Bordeleau. Elle prépare une rétrospective de ses quarante années en tant qu’artiste en arts visuels pour l’été 2020 au MA Musée d’art de Rouyn-Noranda. Elle travaille également sur une pièce en duo avec l’artiste mexicaine d’origine nahuatl Guillermina Ortega sur les femmes autochtones de leurs communautés respectives qui ont disparu ou ont été assassinées. Chapeau à cette artiste qui fait résonner la parole des disparues ici comme ailleurs dans le monde.

 

UN CRI DU CŒUR TOUT EN POÉSIE : LECTURE DU RECUEIL POÉSIE EN MARCHE POUR SINDY

Dominique Roy

 

Dans ce long poème de l’auteure Virginia Pesemapeo Bordeleau, Sindy Ruperhouse, une femme de la Première Nation Abitibiwinni de Pikogan disparue depuis avril 2014, devient le visage emblématique de toutes ces femmes autochtones disparues et assassinées au Canada, mais aussi celui de toutes les femmes tout court.

 

C’est à travers un questionnement qui cache sûrement certaines hypothèses qu’on vit le vide laissé par une personne disparue, qu’on la sent plus présente que jamais même si on ne la voit pas, qu’on cherche celle qui est introuvable, qu’on imagine l’inimaginable douleur des parents qui attendent, impuissants, la découverte d’ossements. 

 

Fragilité, tristesse, souffrance, colère, compassion, indignation, mépris et haine ne sont que quelques-unes des émotions couchées sur ce papier des Éditions du Quartz. L’écriture est stylisée, les comparaisons sont révélatrices. Et les éléments de la nature, faisant partie intégrante des traditions spirituelles des autochtones, sont utilisés avec tact et intelligence pour décrire et expliquer une douleur et une attente qui sont en fait indescriptibles et inexplicables.

 

Pourquoi? Comment? C’est ce qu’on peut lire entre les lignes. Et les réponses ne viennent pas. Pour pallier ce néant, Virginia Pesemapeo Bordeleau choisit la poésie. Elle écrit :

« La poésie c’est de mots pour consoler

Du vent pour porter nos discours

Un bruit pour couvrir le vide

Nous le savons »


Auteur/trice

Michèle Paquette est retraitée de l’enseignement des sciences naturelles au niveau collégial. Elle écrit dans L’Indice bohémien depuis 2013. Elle habite en Abitibi-Témiscamingue depuis 2006. Elle a vécu sur la Côte-Nord où elle s’est occupée d’environnement. Ici, elle s’intéresse tout particulièrement à la culture abitibienne.