QU’EST-CE QU’UNE AIRE PROTÉGÉE?

 

Au Québec, une aire protégée est « un territoire, en milieu terrestre ou aquatique, géographiquement délimité, dont l’encadrement juridique et l’administration visent spécifiquement à assurer la protection et le maintien de la diversité biologique ainsi que des ressources naturelles et culturelles associées ». La province s’est engagée à atteindre la cible internationale de Nagoya qui vise à protéger 17 % de l’ensemble du territoire terrestre et en eau douce d’ici 2020, ainsi que 10 % de milieux marins. Pour parvenir à cette cible de 17 %, le gouvernement vise la protection d’au moins 20 % du territoire au nord du 49e parallèle (Plan Nord), de 12 % de la forêt aménagée méridionale et aucune cible précise pour les basses-terres du Saint-Laurent. La cible est donc plus ambitieuse là où les contraintes d’utilisation du territoire et de mise en valeur des ressources naturelles sont moindres.

Avec ses ressources forestières, minières et énergétiques, on pourrait croire que les aires protégées freinent le développement de l’Abitibi-Témiscamingue. Ajouter de nouvelles aires protégées représente, à tort, une contrainte. Toutefois, ne négligeons pas l’utilité des aires protégées. Celles-ci rendent des services essentiels à l’être humain et la biodiversité (nommés services écosystémiques). Parmi ces services, notons par exemple la régulation de la circulation de l’eau ou de la qualité de l’air, la pollinisation, le stockage du carbone et le maintien de la diversité génétique. Certains services dits culturels visent le maintien de la santé mentale et physique ou le tourisme. Sans ces services, il nous faudrait trouver des moyens pour les compenser ou les remplacer.

QUEL EST LE PORTRAIT ACTUEL DU RÉSEAU D’AIRES PROTÉGÉES?

 

La dernière mise à jour du Registre des aires protégées du Québec au 31 décembre 2019 établit le bilan à 10,04 % pour l’ensemble de la province et à 7,81 % pour la région de l’Abitibi-Témiscamingue. Il reste donc un peu moins d’un an pour atteindre la cible de 17 %. Rappelons-nous que le gouvernement annonçait récemment son souhait d’octroyer un statut permanent à huit réserves aquatiques et de biodiversité projetées d’ici la fin de l’année 2020 pour l’Abitibi-Témiscamingue, ainsi qu’aux agrandissements qui leur sont associées. Ces agrandissements amèneront le territoire sous protection à 9,28 %. C’est une avancée notable, mais encore insuffisante.

QUELLES SONT LES PERSPECTIVES?

 

En 2016, le ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques (MELCC) avait réalisé une consultation publique dans la région pour y présenter douze zones d’études. Il s’agissait de potentielles candidates à la consolidation du réseau d’aires protégées existantes permettant d’atteindre 12 % du territoire protégé en Abitibi-Témiscamingue. De plus, ces zones d’étude permettraient d’atteindre une meilleure répartition des aires protégées dans la région, car deux MRC accusent toujours un retard très important, soit les MRC d’Abitibi et d’Abitibi-Ouest. Toutefois, aucune avancée n’a été réalisée depuis 2016, en raison d’un imbroglio ministériel. Sans consensus de la part du ministère de la Forêt, de la Faune et des Parcs et du ministère de l’Énergie et des Ressources naturelles, et sans une réelle volonté de la part du MELCC d’aller de l’avant, le dossier stagne.

Plusieurs milieux sensibles devraient être protégés rapidement, comme les eaux de surface d’intérêt public (pour l’approvisionnement en eau potable), les aquifères granulaires (moraines et eskers), les écosystèmes exceptionnels et les habitats d’espèces menacées ou à statut précaire. Au-delà des cibles à atteindre, il est bien plus important de protéger les milieux qui représentent un intérêt écologique d’importance et de veiller à une bonne répartition sur le territoire. Se concentrer sur le Plan Nord, au détriment du Sud, n’est pas une solution viable à long terme!