Pour cette vingt-et-unième chronique, j’ai choisi de vous présenter une auteure anglophone de la région. Mary Lou Dickinson a grandi à Bourlamaque parmi les familles de mineurs. Elle vit aujourd’hui à Toronto, mais elle a gardé ses liens avec la communauté valdorienne. Avec ce roman, elle signe sa deuxième publication. Son premier titre, One Day It Happens, paru en 2007, rassemble des nouvelles dont certaines déjà exprimaient l’empreinte de cette appartenance.

Quatre personnages se croisent après de longues années. Lucien est resté, Michelle est revenue s’installer depuis un certain temps, Nick et Libby vivent à Toronto et sont en visite. Ils se sont connus jeunes, alors qu’ils grandissaient dans Bourlamaque et ils sont tous rattachés les uns aux autres par Marcel, un enfant qui évolue dans des conditions aussi dures que celles qu’ils ont connues.

Essentiellement, l’auteure raconte la vie de gens qui ont grandi ensemble et qui aujourd’hui doivent composer avec leur passé autant qu’avec leur présent. Elle présente des personnes dans la quarantaine qui traversent les deuils et les bilans occasionnés par les hauts et les bas du quotidien. À cela s’ajoutent les amitiés, les amours, les rêves et les déceptions, opposant la fragilité de la condition humaine à la dure réalité de la vie dans une ville minière – la phrase « It’s a tough town under the surface » revient à quelques reprises, et semble faire autant référence aux gens qu’à la roche. En reflétant les nombreuses divisions de l’époque entre catholiques et protestants ainsi qu’entre francophones et anglophones, le passé révèle la profondeur des déchirures provoquées par le contexte politique et social des années 50.

L’auteure rebâtit la vie des personnages en les laissant raconter leurs propres souvenirs, auxquels elle entremêle le point de vue et les souvenirs des autres personnages ; ce procédé permet d’avoir en même temps une perspective intérieure et extérieure, ce qui traduit bien la complexité de la situation socio-économique entre patrons et mineurs ainsi que le lourd héritage historique et linguistique.

Pour la génération qui a connu le passé de Val-d’Or, les références rendent facile la reconnaissance des lieux et de l’ambiance de cette époque. L’histoire correspond aux histoires qui circulent sur les premières décennies de Val-d’Or. L’intérêt du livre repose aussi sur le fait que Mary Lou Dickinson a su saisir le rythme, le souffle de la ville d’aujourd’hui. \


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