Il faut remonter à 1686 et à l’expédition d’Iberville pour retrouver l’origine de la vieille mine de Guigues. Lorsque l’expédition du Chevalier de Troyes et d’Iberville quitte Montréal en traîneaux tôt au printemps de 1686, quelques membres savent déjà qu’ils ne se rendront qu’au lac Témiscamingue. Le 24 mai, l’Amérindien Coignac les amène sur le site de la mine où Chevalier de Troyes prélève quelques échantillons qui seront acheminés à Montréal.

Dès juillet de la même année, Denonville envoie le Chevalier de Tonty explorer la mine. Dans son rapport, de Tonty dit : « Cette mine est à 130 lieues de Montréal (…)  Ce métal est d’un beau jaune et très dur, et l’on ne doute pas que cette mine soit considérable. »  Les échantillons ramenés de Guigues sont alors expédiés au roi de France. Cette découverte ne rencontre cependant que peu d’intérêt. Elle tombe alors dans l’oubli général pour presque deux siècles.

Bonne mine, bad mine

En 1850, un certain E. V. Wright reçoit une concession forestière au Témiscamingue et c’est fortuitement qu’il redécouvre la mine de Guigues, qui portera d’ailleurs son nom. Il ignore qu’il s’agit du site d’une ancienne mine. Les échantillons qu’il rapporte dormiront pendant plus de 20 ans sur son bureau, puis en 1870 il décide enfin de les faire analyser. Les résultats démontrent leur fort potentiel minier en argent et en plomb. En 1877, Wright acquiert le site. On en extrait dix tonnes de minerai que l’on charge sur un énorme radeau. Parvenu aux rapides de Deux-Rivières, le radeau coule, emportant avec lui sa précieuse cargaison. Les travaux vont quand même se poursuivre et un puits de 65 pieds de profondeur est creusé dans le roc précambrien.

En décembre 1889, on voit arriver W. R. Chapin, de New York, qui se porte acquéreur de la mine. Il s’y enfoncera plus profondément que tous ses prédécesseurs, aux sens physique et financier du terme. En 1891, ses déboires à la Bourse l’obligent à revendre à Wright. En 1902, on compte une centaine d’employés à la mine, le plus grand nombre de toute son histoire. Elle passe alors aux mains de la British American Lead Co. qui la ferme l’année suivante. En 1927, Noé Timmins, qui donnera son nom à la ville de Timmins, essaie de colmater les galeries, sans succès. Finalement, en 1935, la mine est vendue pour recouvrement de taxes à Donat Goulet, avocat à Ville-Marie.

Dans l’effervescence de l’après-guerre, la compagnie Cobalt-Badger Silver Mines tente de la réactiver. L’assèchement est une lente et coûteuse opération. En 1952, le prix de l’argent s’effondre, ce qui oblige la Cobalt-Badger à mettre fin à ses activités.

Il reste peu de vestiges de la mine de Guigues, mais pour rappeler son existence aux générations futures, le Comité d’embellissement de Guigues a pris l’initiative de faire ériger un cadran solaire à sa mémoire. 


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