Quand j’étais enfant, à l’approche du jour de l’An, on faisait la course aux étrennes. On rencontrait quelqu’un, on lui criait «Mes étrennes!» L’interlocuteur devait nous offrir un cadeau de fin d’année. De son côté, il pouvait en faire autant avec quelqu’un d’autre. Le jeu continuait ainsi jusqu’aux premiers jours de janvier. Avec le temps et la radinerie de certains, cette tradition a disparu.
 
Le souvenir aidant, il m’est venu l’idée de vous offrir, chers lecteurs bohémiens, vos étrennes. Mais n’ayant pas beaucoup d’imagination, j’aidécidé de partir en voyage, en m’enfermant dans mon appartement avec Œuvres de Cioran. Le voyage possède la vertu de nous révéler à nous-mêmes et de stimuler notre imagination. En parlant de voyage, je me rappelle mon arrivée à Montréal.
 
L’agent d’immigration m’a fait la conversation en créole, car il a vu que j’étais Haïtien. Alors qu’il me rendait mon passeport, il m’a souhaité «Bienvenue chez vous!»
Sans aucun doute, il connaissait Cioran.
 
2016 aura été une année difficile. Entre les États-Uniens qui ont renfloué le déconomètre avec le Donald et ces fous de Dieu qui trucident des innocents à tout-va, les occasions de s’affliger n’ont pas manqué. Je doute que 2017 soit bien meilleure. Pour autant, on ne devrait pas sombrer dans la résignation ou dans la psychose. C’est tout l’intérêt de lire Cioran, un type lucide, désabusé, triste, mais toujours drôle. De plus, il est inspirant pour les chroniqueurs à court d’idées.
 
Si un jour vous devez écrire une chronique et que vous n’avez pas d’imagination, lisez Cioran et vous verrez.
Vous pouvez commencer par les fragments. Aveux et anathèmes ou Syllogismes de l’amertume, par exemple, ou encore de l’inconvénient d’être né, qui montre un Cioran très intuitif.
 
Cioran connaît tellement les contradictions de la vie qu’il déplore presque sa naissance. Mais il assume paradoxalement la possibilité de vivre. C’est parfois répétitif, mais c’est d’une intelligence et d’une lucidité qui vous aideront à vivre 2017 avec philosophie et avec humour.
 
Les écrivains ne changent peut-être pas la vie, mais ils aide nt à la supporter. Le jour où cela changera, le monde ne sera plus le même.

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